
GROS GIBIER
Éviscérer sans contaminer
Pour procéder à une éviscération propre de son gibier, il est important de le placer sur le dos et bien droit pour permettre aux viscères de descendre vers le bas par gravité. Les doigts aideront ensuite à maintenir les intestins loin de la pointe du couteau.

LOUIS TURBIDE

Par Réjean Lemay
Photos : Richard Cayouette
et Réjean Lemay
Le plaisir est terminé et maintenant c’est le gros travail qui commence. C’est souvent ainsi que l’on définit l’éviscération et les autres tâches connexes après la récolte d’un gros gibier. À la chasse à l’orignal, la plupart des groupes de chasseurs ont un volontaire, souvent désigné, qui va s’acquitter de cette tâche. Lors de l’éviscération, la plus grande hantise des chasseurs est la perforation du système digestif (la panse). Pour un nouveau disciple, la tâche peut sembler très ardue, surtout s’il est seul lors de son premier abattage.
L’éviscération
Le sternum (os de la poitrine) est prolongé par un cartilage appelé plexus solaire et l’estomac (panse) débute juste en dessous. Pour un orignal, coupez la peau sur toute la longueur du sternum, jusqu’au cartilage (photo 1). Pour le chevreuil, faites une petite incision au bout du sternum pour dégager la peau sur le cartilage (plexus solaire) (photo 2) d’environ 7 cm (3 pouces).
Souvent, les perforations intestinales surviennent parce que l’éviscérateur ne voit pas la lame de son couteau qui est cachée par les poils, surtout chez l’orignal. Pour ceux qui n’ont jamais procédé à l’éviscération ou qui ont perforé la panse, voici un petit truc fort simple qui vous aidera, j’en suis certain. Procédez tout simplement en deux étapes séparées. Dans un premier temps, coupez seulement la peau à partir du sternum jusqu’entre les deux cuisses. Glissez la lame entre la peau et les membranes abdominales (photo 3), puis procédez à la coupe des membranes abdominales (photo 4). Puis poursuivre la coupe jusqu’entre les cuisses (photo 5). En procédant en deux étapes, vous allez être en mesure de bien voir la progression de votre lame de couteau.
Lame régulière
Éviscérer un animal avec une lame régulière demande de l’attention et de la minutie. Il faut juste prendre son temps et se concentrer sur la procédure. Il est préférable d’utiliser un couteau bien aiguisé et à pointe tombante (drop point) (photo 6) pour éviter les dégâts. L’incision au bout du plexus solaire doit être assez grande pour y insérer deux doigts (l’index et le majeur). Placez la lame du couteau entre les deux doigts, le taillant vers le haut (photo 7). Insérez les deux doigts dans l’ouverture et prenez garde que la lame ne dépasse pas en-dessous des doigts (photo 8). En maintenant une pression sur les deux doigts de façon à tendre la peau vers le haut, coupez la peau de la pointe du sternum jusqu’entre les deux cuisses.
Une autre technique consiste à tendre (tirer) la peau et/ou la membrane abdominale vers le haut avec une main et de les couper en maintenant le taillant du couteau vers le haut (photo 9).
Les couteaux d’éviscération
Il y a des techniques d’éviscération qui présentent moins de risques de perforation que d’autres, surtout pour un débutant, mais souvent un outil peut faire toute la différence.
Nous retrouvons sur le marché différents couteaux conçus spécifiquement pour l’éviscération. Il y a le couteau d’éviscération recourbé, le couteau avec une lame crochet et la lame avec un bout arrondi ou avec une boule au bout de la lame.
Le couteau d’éviscération recourbé
Souvent appelé couteau Wyoming, du nom de la compagnie qui l’a popularisé, ce couteau est probablement le plus ancien des couteaux d’éviscération. Il est très facile d’utilisation (photo 10).
Insérez la pointe recourbée du couteau au bout du cartilage du sternum et redressez le couteau légèrement (photo 11). La lame du couteau devrait couper la peau et/ou la membrane abdominale assez facilement. S’il y a une résistance, modifiez simplement l’angle de coupe ou la prise en main ce qui peut être nécessaire pour l’orignal (photo 12). Avec un minimum de pratique, la coupe se fait presqu’aussi aisément que d’ouvrir une fermeture éclair.
La plupart des modèles possèdent, sur le dessus, un couteau qui a la forme d’un aileron (comme un requin) qui est protégé par un capuchon en plastique. Cette lame est très coupante et peut être utilisée pour couper la peau sur le sternum. Le protecteur (capuchon) de l’aileron est très facile à perdre, ce qui rend le couteau très dangereux. Personnellement, j’ai placé un ruban gommé sur le taillant de l’aileron pour le rendre inoffensif et maintenir le protecteur en place (photo 13).
La plupart de ces couteaux sont démontables, ce qui facilite leur nettoyage. Les lames sont affutables et la plupart des compagnies vendent des lames de rechange.
Personnellement, j’ai essayé trois différents modèles mais je suis toujours revenu au Wyoming, tout en métal. Vous pouvez facilement éviscérer une dizaine de chevreuils avant d’aiguiser ou de changer la lame. Le cuir de l’orignal est beaucoup plus exigeant pour le taillant. Après trois éviscérations, un aiguisage ou un remplacement de lame doit être envisagé.
La lame à crochet
Il s’agit d’une lame de couteau régulière munie d’un crochet situé sur l’extrémité supérieure de la lame (photo 14). Nous retrouvons ce type de crochet sur des couteaux à lame fixe ou pliante. L’avantage est de n’avoir qu’un seul outil.
La lame à crochet, est assez facile d’utilisation. Sur un chevreuil, placez le crochet dans l’ouverture sur le sternum entre les deux doigts (photo 15). La coupe de la peau d’un orignal requiert plus de minutie à cause de son épaisseur (photo 16). Il faut procéder avec plus d’attention à cause de l’épaisseur de la peau de l’orignal. Le crochet est moins profond que le couteau de type crochet mais lorsque le bon angle de coupe est trouvé le travail est plus facile.
Pour aiguiser le crochet, utilisez une lime ronde (comme celle utilisée pour une scie à chaîne). Glissez simplement la lime dans l’ouverture du crochet et en respectant l’angle de coupe.
Lame à pointe arrondie
Il s’agit d’une lame de couteau qui se termine par un bout arrondi ou une protubérance (boule) pour prévenir la perforation du système digestif (photo 17). Disponible en plusieurs modèles, ce type de lame gagne en popularité.
Insérez le bout du couteau dans l’ouverture pratiquée sur le plexus solaire, (photo 18) relevez la lame du couteau et glissez simplement le couteau en direction des cuisses.
Certaines compagnies offrent une lame régulière et une lame d’éviscération sur le même couteau (swing blade). D’autres compagnies proposent un couteau pliant avec trois lames (lame régulière, lame d’éviscération et une petite scie).
Dans certains abattoirs, des préposés à l’éviscération ne travaillent qu’avec ce genre de couteau. Aujourd’hui, j’utilise ce type de lame pour l’éviscération d’un orignal. Ce couteau est très facile à utiliser.
Procédure :
Conclusion
Les couteaux d’éviscération sont des outils qui vont vous permettre d’effectuer l’ouverture abdominale de façon beaucoup plus sécuritaire que l’utilisation d’une lame régulière. Peu importe le type de lame, procédez lentement et si cela est nécessaire, ajustez simplement l’angle de coupe afin de favoriser la progression de la lame (photo 19). Pour plusieurs, même si le couteau à éviscération est un outil de plus dans le sac à dos, son utilisation réduira grandement les risques de contamination venant du contenu stomacal ou intestinal de l’animal.