CHEVREUIL ANTICOSTI

Texte et photos
Maxime Dubé
La pleine lune, cette mal-aimée
C’est indéniable, les chasseurs habitués auront le réflexe de vérifier à quel stade de la lune leur séjour se déroulera. Une réaction commune sera la déception lorsqu’on se rend compte que la pleine lune y sera présente. Est-ce qu’il existe des solutions afin de trouver les chevreuils espérés malgré cet « handicap » majeur?
On connait tous, à un certain degré, l’influence de la lune sur des phénomènes de la nature ou sur le comportement animal. Quant aux déplacements des chevreuils, comme on a pu le survoler dans l’article sur les bonnes périodes d’activités, la difficulté est de les prédire avec certitude. On ne peut isoler indépendamment ce paramètre car on doit tenir compte également de certains autres facteurs d’importances. Il demeure que l’élément-clé à retenir est que les périodes d’activités des herbivores ont une certaine corrélation avec des positions de la lune autour de la Terre.
Comme on a pu le constater, les périodes d’activités des chevreuils sont en perpétuel changement d’heure, au fur et à mesure que les jours se succèdent. Il arrive donc, à un certain moment, que ces bonnes périodes se retrouvent en dehors des heures légales de chasse. Dans ce cas, nous avons qu’à nous conformer à la loi. Cependant, il arrive également que ces périodes sortent un peu de nos habitudes de chasse, c’est à ces occasions qu’on doit modifier notre stratégie afin d’améliorer nos chances de récolte.
Pleine lune et activité de mi-journée
Une de ces occasions qui demande un certain ajustement est la présence de la pleine lune. On doit comprendre que la période majeure d’activité se joue en pleine nuit, cependant la deuxième période en importance sera présente 12h25 plus tard, en plein milieu de journée… Et très souvent, sur notre retour au camp, afin de prendre notre diner. À moins de prendre votre repas sur le terrain, il est fort possible que vous ratiez des bonnes occasions de récolte. Est-ce que de rester sur le terrain sur l’heure du diner, vous assure alors d’assister à de nombreuses rencontres?
Pas tout à fait, si on ne prend pas la peine d’analyser certains autres paramètres. Un des éléments qu’on devra prendre en considération sera le temps de l’année, voire à quel mois votre séjour se déroule. Comme à toutes mes analyses, on doit mettre à l’avant plan les besoins fondamentaux des chevreuils afin de baser une stratégie. Présentement, un des paramètres d’influence sera la thermorégulation de l’animal. On doit garder en tête ce paramètre pour les mois de septembre et octobre car il est possible lors de ces deux mois de faire face à des vagues de chaleur au-delà des 15 degrés Celsius.
Changement de pelage de l’animal
Concernant la pleine lune pendant le mois de septembre, cette dernière exercera une influence très différente sur le lieu de chasse à privilégier. Cela dépendra si cette phase se déroule au début du mois ou pendant la deuxième moitié de cette période. Afin de comprendre la différence entre ces deux éventualités, on doit s’attarder au changement de pelage de l’animal qui passera d’un pelage estival très court de couleur rousse vers un pelage plus long, à poil creux isolant de couleur brun-grisâtre. Habituellement, le changement de pelage commence à s’effectuer vers le début de la deuxième semaine de septembre mais comme dans tous les phénomènes de la nature, il y a des pressés et des retardataires dans ce processus. Puisque le changement de pelage est progressif, plus les jours passeront et plus le pelage hivernal poussera en longueur, ce qui amènera un pelage de plus en plus isolant. Quand on prend un peu de recul dans ce processus de mue, on comprend qu’une pleine lune en début septembre aura un effet sur les heures de déplacement mais les chevreuils pourront toutefois garder leurs sites nourriciers connus pendant les mois estivaux qui leur procureront une nourriture de qualité. À l’inverse, plus on approchera la fin du mois et plus les chasseurs devront trouver des sites plus frais sur l’heure du midi afin de trouver les chevreuils en quête de nourriture. C’est le lien direct qu’on doit effectuer entre le besoin d’assouvir la thermorégulation des chevreuils et les sites de nourritures qu’ils utiliseront.
Les autres bonnes périodes
Maintenant que la période médiane du midi a été expliquée, on ne doit pas oublier que ce n’est pas la seule période d’activité de la journée. Il existe également des périodes tertiaires qu’on peut exploiter, lorsque la lune sera à 90 et 270 degrés par rapport à la Terre. Ces périodes sont plus faciles à exploiter en septembre et en début octobre, tout simplement parce que les longues heures de chasse en début de saison permettent d’utiliser ces périodes à votre avantage pendant les heure légales. Étant donné que régulièrement ces périodes débutent ou se terminent hors des heures légales, il est impératif d’être dans les bons secteurs très tôt le matin ou étirer son temps jusqu’à la dernière minute dans ces endroits. Malheureusement, trop souvent nous sommes en déplacement vers les lieux de chasse ou sur le retour au bercail à ces heures. D’ailleurs, nous pouvons effectuer plusieurs observations sur la route pendant cette période. Les chasseurs auront tout avantage à se lever beaucoup plus tôt et revenir plus tard qu’à l’habitude et effectuer la route de nuit afin de profiter de ces périodes très courtes mais tellement productives puisque la température est plutôt fraiche à ces heures de début ou fin de journée. Soyez sûr d’amener vos étuis souples dans ces circonstances afin de respecter la loi en vigueur quant au transport d’arme à feu en dehors des heures légales de chasse.
Quoi faire lorsque les chevreuils sont au repos
Comme vous pouvez le constater, il existe des moyens de contrer cette période de pleine lune tout simplement en ajustant vos heures de chasse aux périodes d’activités des chevreuils. Cela demande un effort supplémentaire mais entraînera une résultante positive dans vos observations de chevreuils sur le terrain. Pour donner suite à ces ajustements, qu’est-ce que les chasseurs peuvent effectuer de plus pendant ces deux longues périodes de repos où la majorité des chevreuils sont en mode rumination? C’est sûr que vous pouvez toujours retourner au campement, mais il y a très peu de chance de connaitre le succès avec cette stratégie! Gardez cependant en tête de faire une ou deux siestes sur le terrain pendant ces périodes afin de récupérer quelques heures de sommeil. Vous resterez alerte et concentré pendant vos périodes de chasse active. Déjà en adoptant cette stratégie, vous vous assurez d’une recette gagnante pour cette semaine particulière.

Pause et sieste sur le terrain pendant les périodes d’inactivités durant les quelques jours précédant et succédant la pleine lune.

Ce buck a été prélevé pendant une période d’inactivité en parcourant les zones de repos potentielles du secteur…
Une autre stratégie qui pourra amener un certain taux de succès sera alors de chasser les dortoirs potentiels. La technique utilisée sera très variable selon le type d’habitat chassé. Dans l’éventualité d’un secteur boisé, vous aurez à réduire énormément votre vitesse de chasse, on pourrait considérer 1km/heure comme une vitesse de base afin de surprendre les chevreuils et non seulement voir des chevreuils en fuite. La discrétion sera votre meilleur atout dans ces circonstances. Il est de mise de chasser à bon vent également. Les meilleurs secteurs seront les zones inéquiennes de classe C ou D offrant une certaine distance de visibilité. Si ces zones peuvent être attenantes à des secteurs semi-ouverts ou ouverts tels que des tourbière, bûchés récents ou cours d’eau, vous aurez mis toutes les chances de votre bord afin de croiser ces chevreuils au repos.
Dans les circonstances de chasse dans de grandes ouvertures, une bonne technique sera de couvrir les zones arbustives denses d’épinette hautes de 1 à 3 mètres de hauteur en bordure des plaines. Vous augmenterez vos chances en couvrant du terrain rapidement, vous aurez à vous tenir à une distance de ces structures afin qu’un chevreuil se lève pour vérifier la source de bruit ou d’odeur. Vous avez bien lu! On doit faire du bruit ou marcher à mauvais vent afin de faire lever les chevreuils de leurs couches dans ces secteurs ouverts toutefois en gardant une distance pouvant vous donner l’occasion d’un tir avant la fuite de ces chevreuils vers un couvert plus dense. Une distance sécuritaire pour un chevreuil dans ces occasions sera d’au moins 100 mètres et ne craignez pas de marcher d’un pas normal afin de créer un certain bruit de déplacement. Il est nécessaire de donner un coup d’œil régulièrement à l’arrière de nous, au-dessus de notre épaule, afin de déceler les chevreuils qui réagiront à retardement. C’est une situation qui arrive assez régulièrement! Un seul bémol à cette situation, concernant la pleine lune d’octobre ou fin septembre lors d’une journée très chaude, il sera préférable alors de se tourner vers des sentiers sous le couvert forestier car ces zones d’épinettes basses offriront aucune protection pour assouvir la thermorégulation des chevreuils. Il en est de même pour les secteurs couverts majoritairement de mélèzes, vous risquez de voir une quantité phénoménale de couches au sol mais cette zone sera désertée en ces moments de canicule lors des pleines lunes.
Le mot de la fin
À la suite de la lecture de ce texte, j’espère avoir enlevé toutes vos appréhensions quant à vos chances d’effectuer un beau séjour malgré la présence marquée de la lune. Avec un peu d’ajustement, les chasseurs pourront alors prendre les mesures nécessaires afin de croiser le gibier recherché plutôt que de se rabattre sur l’excuse que le gibier ne bougeait pas. Car une chose est certaine, c’est que tous ces beaux chevreuils récoltés pendant le mois de novembre parcourent bel et bien vos secteurs pendant les mois précédents.
Le sujet de la pleine lune pendant le mois de novembre fera l’objet d’un prochain texte.